mardi 26 mai 2009

Le syndrome Copernic

Les récits écrits à la première personne par un schizophrène amnésique ne sont pas légion et la cohérence n'est pas souvent leur qualité première.

Celui-ci fait largement exception. Il faut dire que les événements qui conduisent le narrateur à rédiger ce récit n'ont rien de banal. C'est l'effondrement d'une des tours de la Défense suite à une attaque terroriste qui l'y pousse. Vigo Ravel, c'est son nom - du moins le croit-il - est le seul survivant de la catastrophe. Il venait consulter son psychiatre, le docteur Guillaume, du Cabinet Mater, situé au 44e étage de la tour, lorsque des voix dans son crâne l'ont dissuadé de rester et il est donc sorti du building juste avant son effondrement.

Il voudrait y retourner pour aider, pour comprendre, pour savoir... Mais les services de secours le repoussent et bientôt, deux hommes rien moins qu'amicaux le poursuivent, son appartement est fouillé et il apprend que le cabinet médical où il était soigné... n'a jamais existé.

Vigo fuit, il se terre dans un hôtel de troisième ordre en attendant que la situation se calme. Afin de tempérer ses angoisses qui le taraudent, il décide de consulter un autre psy. C'est une femme, qui le comprend et le persuade d'entreprendre une recherche sur son passé, de contacter ses parents, de revoir son psychiatre et son employeur... En un mot de remettre de l'ordre dans sa vie.

Dans la salle d'attente, il croise une jeune femme, Agnès, au physique quelque peu exotique et qui devient vite son amie, sa complice dans sa quête. Car, désormais, Vigo n'aura de cesse de trouver la vérité, sa vérité.

Et celle-ci ne se dévoile que lentement, au gré de péripéties haletantes, de courses-poursuites harassantes, de rencontres meurtrières. Vigo va rencontrer sur sa route des personnages fantasques et fantastiques, un garde du corps, un groupe de hackers, des militaires plus ou moins réguliers,... Tout un monde interlope qui grenouille entre les hautes sphères du pouvoir et les sociétés privées de mercenaires. Il découvrira en fin de parcours,sa véritable identité, les raisons de son mal, l'origine des voix qui le poursuivent et le guident dans son parcours sanglant et labyrinthique. Mais à quel prix ?

Une fois de plus, Henri Loevenbruck signe un thriller brillantissime, aux ramifications extrêmes et aux implications aussi terrifiantes que passionnantes. Un pur régal.

Petite nouvelle de dernière minute : des lycéens viennent d'attribuer à ce livre le prix Coeur noir. Il ne faut pas désespérer de la jeunesse, elle vient de prouver son bon goût et sa clairvoyance...

Henri Loevenbruck, Le syndrome Copernic, J'Ai Lu, 8550, 509 pp. de pur bonheur...

lundi 25 mai 2009

Une liste interdite et un conteur magistral

Encore une découverte ! La Liste interdite d'Olivier Descosse est une vraie révélation pour moi : celle d'un romancier majeur, d'un auteur de thriller hors normes.

Michel, flic noir parisien en exil en province pour motifs conjugaux, est chargé d'une enquête sur le cadavre d'un homme carbonisé dans sa voiture. Aux premiers abords, il s'agit d'un banal accident de roulage. L'homme circulait de nuit, à une vitesse folle, sur une voie empruntée par les engins agricoles. Mais, Michel, sent très rapidement qu'il s'agit d'autre chose.

Un autre cadavre, à Paris, cette fois. Un grand rouquin à la vie apparemment sans histoire, se serait jeté de la fenêtre de son appartement, au 17e étage. C'est la juge d'instruction Claire Brissac qui hérite du dossier. Ici aussi, l'apparition d'un policier féru de culture chinoise va redistribuer les cartes et apporter des éléments qui dirigent rapidement les enquêteurs vers d'autres investigations.

Les deux enquêtes progressent sans lien apparent pendant plus de 500 pages. Et c'est au terme de l'histoire, dont la rigueur de la construction s'apparente à celle d'une tour double, d'un monument à deux corps, que les deux pistes se rejoignent magistralement...

Le suspense est permanent, l'histoire totalement crédible malgré des rebondissements hauts en couleur et les personnages sont d'une profondeur psychologique rare dans ce genre de littérature. Ils portent en eux - et à travers la traque des criminels qu'ils affrontent - des blessures anciennes qui ne cicatriseront jamais et qui leur donnent dans nos sensations et nos mémoires, une réalité impressionnante.

Ce sont autant d'univers qui s'entrecroisent et tissent la trame complexe d'une histoire compliquée sans être jamais alambiquée : la province faussement endormie, un Paris multifaces, des triades chinoises, un banquier taciturne, un Rambo de troisième ordre, des Skinheads assassins, un politique corse sinophile et sans scrupules... Tout cela se bouscule, se téléscope, se rate, se rejoint, se détruit ou se soutient... Pour notre plus grand plaisir.

Du grand art.

Olivier Descosse, La Liste interdite, J'Ai Lu, 8888, 604 pp.

dimanche 24 mai 2009

Une testament meurtrier... et un auteur d'enfer !


C'est toujours émouvant de rencontrer un nouvel auteur. Peut-être pas nouveau pour vous, mais nouveau pour moi. Je n'avais jamais entendu parler d'Henri Loevenbruck avant d'en apercevoir un roman dans le rayon Poche d'un supermarché. La quatrième de couverture m'a vite convaincu de commencer la lecture - je devrais dire la dévoration - du roman... et je ne me suis plus arrêté. En moins de deux jours - et d'une bonne portion de la nuit - j'avais avalé les quelques centaines de pages d'aventures palpitantes que m'offrait ce jeune auteur français aussi bon story teller qu'un auteur de thriller américain...

Damien Louvel est scénariste à New York. Scénariste français qui a réussi à injecter une french touch à une série américaine très drôle et très sexe. Mais il est en bout de course et s'amuse de moins en moins. Un coup de fil de Paris va le ramener non seulement au Pays mais surtout, face à lui-même et à ce père qu'il n'a plus vu depuis onze ans et qui vient de mourir.

Rentré à Paris pour régler les formalités de la succession, il prend vite la direction d'un petit village du Vaucluse dans lequel son père - pourtant parisien endurci - a acheté une petite maison. Là, il découvre les nouvelles passions - obsessions ? - de son père et fait la connaissance de Sophie, une jeune femme au charme trouble et à l'esprit aiguisé comme une lame tolédane...

Tous deux vont connaitre non seulement des aventures extraordinaires, mais vont faire l'objet d'une traque incessante et meurtrière de la part de deux organisations étrangères qui recherchent un message et un code dont le père de Damien avait retrouvé la trace. Ecrit et publié avant le Da Vinci Code, ce livre fait la part belle aux sources du christianisme, à Leonardo da Vinci, aux charmes de la Joconde, aux énigmes peintes et autographes de Dürer et aux tentatives d'étouffement du Vatican.

Henri Loevenbruck s'impose comme un des maitres du genre : son thriller ésotérique vous tient en haleine de la première à la dernière ligne et vous fait cadeau, sans avoir l'air d'y toucher, d'une magnifique galerie de personnages inoubliables...

Henri Loevenbruck, Le Testament des siècles, J'Ai Lu, 8251, 380 p.