jeudi 5 juin 2008

Un doux parfum de mort


Adela, une jeune fille de quinze ans appartenant à une famille de « nouveaux » à Loma Grande, est retrouvée assassinée, le tueur lui ayant percé le cœur d’un coup de couteau dans le dos…

Quelqu’un au village la reconnaît et l’identifie comme la fiancée de Ramon. Et chacun y allant de son opinion ou de son ragot, une étrange histoire se tisse de bouche à oreille, histoire d’amour et de mort, de meurtre et de vengeance, d’adultère et de punition définitive… Un récit qui croit et acquiert une vie propre, une vie inquiétante car plus personne dans le village ne maîtrise plus cette croissance en métastases. La conclusion de ce récit éclaté comme un miroir brisé, c’est que la fiancée de Ramon a été assassinée et que ce dernier doit la venger.

Le Gitan, un marchand ambulant, trafiquant, contrebandier à ses heures, connu de la police corrompue comme payant ses pots de vin sans discuter, devient rapidement le coupable idéal.

Dès lors, tous les hommes du village prennent part à la préparation de la vengeance. Mais Ramon aura-t-il le courage de tuer le Gitan ? Celui-ci a déjà échappé à plusieurs tentatives d’assassinat et les nombreuses cicatrices de son corps racontent, telles des glyphes d’une civilisation barbare, un autre récit d’immortalité.

Guillermo Arriaga n’est pas un nouveau venu. C’est non seulement un romancier mexicain atypique, c’est aussi le scénariste génial d’Amours chiennes, de 21 grammes et de Babel, trois films du grand Innaritu.

On retrouve dans ce court roman polyphonique le même goût des intrigues complexes, des récits entrecroisés, de la violence qui se déchaîne presque malgré les protagonistes, ou, à tout le moins, en-dehors de leur volonté, comme animée d’une vie indépendante, comme si les tueurs n’étaient que les vecteurs d’une volonté supérieure ou d’un hasard omniscient…

A travers ce récit d’un meurtre et du processus de la vengeance qui en découle, c’est la société mexicaine, malade de la corruption, de la pauvreté et de ses traditions de vendetta qui transforment deux innocents en assassin et en victime.

Un livre qu’on referme avec un goût amer sur la langue, celui de la violence aveugle et du crime imbécile. Un tout grand livre.

Un doux parfum de mort, Guillermo Arriaga, traduit de l’espagnol (Mexique) par François Gaudry, Paris, Editions du Seuil, (Points ; Roman noir : P1836), 202 p.



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